16 371 défaillances d’entreprises au 2e trimestre 2024 (+23,4%) : La phase de rattrapage Covid se referme, la conjoncture prend le relais.Les TPE sont les premières victimes de cette situation
Le nombre d’ouvertures de procédures de sauvegarde, redressement et liquidation judiciaire de ce printemps est élevé (16 371), très au-dessus de la moyenne observée de 13 700 sur les décennies 2000 et 2010. Ce nombre découle d’une conjoncture ralentie et du rattrapage d’une partie des défauts évités pendant la crise sanitaire grâce aux aides. Pour autant, la hausse des sinistres décroit et retombe à +23% contre +35% il y a un an (et même +49% en juin 2022). Cette décélération est très marquée dans plusieurs activités du B2C, selon les données révélées par Altares.
Si trois quarts des défauts concernent des microentreprises de moins de 3 salariés, la tendance la plus forte est observée chez les PME de 50 à 99 salariés dont les défaillances augmentent deux fois plus vite que la moyenne. A noter qu’en dehors des trois plus gros employeurs, le nombre d’emplois menacés tombe à 52 700 soit seulement 1400 de plus (+2,7%) qu’un an plus tôt, selon le groupe Altares, expert historique et référent de la donnée d’entreprises.
Un trimestre au plus haut
16 371 entreprises sont tombées en défaillance entre le 1er avril et le 30 juin 2024 ; seuls les 2e trimestres 2009 (crise financière) et 2013 (crise des dettes souveraines) avaient également franchi la barre des 16 000 défauts. La hausse est ramenée à +23% alors qu’elle était deux fois plus rapide à fin juin 2022 (+49%) et encore très forte il y a un an (+35%).
Avec 416 jugements enregistrés ce trimestre, le nombre de procédures de sauvegarde est en retrait de 3,5 %.
A l’inverse, les redressements judiciaires (4 817) sont en hausse (+39%) et concentrent désormais près de 30% des jugements, retrouvant ainsi les taux d’avant Covid.
Le rythme ralentit en revanche pour les ouvertures de liquidation judiciaire dont le nombre (11 138) augmente de 18,9 % et représente 68% des défaillances, loin des 75% qui prévalaient durant la crise sanitaire.
En données glissées sur 12 mois, la barre des 61 000 cessations de paiement a été franchie en mai et celle des 62 000 le sera en juillet.
12 000 microentreprises frappées
Les trois quarts des défaillances (12 000) concernent des microentreprises de moins de 3 salariés qui enregistrent une augmentation des défauts de 26,4%. Ces structures, dont près d’un quart se situe dans la restauration ou le second œuvre du bâtiment, ne sont pas particulièrement récentes. Ainsi, plus de six sur dix ont été créées avant le 1e confinement sanitaire.
Les PME de 50 à 99 salariés sont en revanche sévèrement touchées. Elles affichent une augmentation très rapide du nombre de défauts (+48%) et elles subissent également une forte poussée des liquidations judiciaires (+91%), 30% de ces 80 PME se concentrent dans deux activités, le transport routier de marchandises et la sécurité privée.
La situation se détend sensiblement pour les PME de taille plus importante et les ETI. 45 structures d’au moins 100 salariés ont fait défaut, un nombre en retrait de près de 17% par rapport au 2e trimestre 2023. Peu nombreuses, ces sociétés menacent néanmoins près de 25 000 emplois (environ un tiers de la totalité des emplois menacés ce trimestre).
En effet, 69 500 emplois sont menacés ce trimestre, un nombre important en augmentation de 25% sur un an. Un chiffre qui s’explique par l’ouverture de procédures collectives sur trois sociétés de plus 1000 salariés.
A peine plus d’une entreprise défaillante sur dix a été créée il y a moins de 3 ans. 1839 structures de cette tranche d’âge ont défailli, un nombre en augmentation de « seulement » 11%.
Dans les autres tranches, la tendance varie peu autour de +25%. Les entreprises de plus de 15 ans sont marquées par une hausse des défaillances de plus de 27% sur un an. Et ce sont les entreprises créées depuis plus de 50 ans qui sont les plus impactées (+37% ; 107 entreprises). La construction reste très impactée.
Dans le B2C, les défaillances reculent pour plusieurs activités
Plus de 250 boulangers ont encore défailli ce trimestre mais ce chiffre est en recul de 1,2% confirmant la trajectoire plus favorable amorcée en début d'année 2024.
La restauration traditionnelle reprend son souffle avec 777 procédures ouvertes (+1,3%) ce deuxième trimestre, soit seulement une dizaine de plus qu’un an plus tôt. La situation ne s'inverse en revanche pas dans la restauration rapide qui compte 824 jugements (un nombre en augmentation de 27,6%).
Moins d'une trentaine de supermarchés ont fait défaut, c'est 45% de moins sur un an.
L'amélioration se dessine ce 2e trimestre dans le commerce de prêt-à-porter qui enregistre à peine plus de 250 procédures un nombre en retrait de 7,7%.
La coiffure poursuit son long rétablissement mais compte encore près de 300 procédures soit 5,7% de plus sur un an. La situation est plus tendue pour les salons de beauté qui comptent 168 procédures, en augmentation de 18,3%.
Avec moins de 40 procédures ouvertes la parfumerie au détail semble plus épargnée (-20,8%).
L’action sociale et la santé humaine évoluent également favorablement. C'est notamment le cas dans les activités d'aide à domicile ou les crèches. La situation est en revanche plus tendue dans les activités d'infirmiers.
Les activités récréatives sont dans le vert notamment les activités liées au sport dont les centres de culture physique.
Le B2B aussi compte quelques activités dans le vert.
26 entreprises de mécanique industrielle ont fait défaut, c’est 2 entités de moins qu’il y a un an. Le recul est du même ordre dans l’installation de machines ou de structures métalliques.
Dans les services aux entreprises la situation se détend pour les agences de publicité (72 ; -11%) et de relations publiques (41 ; -2%).
Les services d'aménagement paysager comptent toujours plus d'une centaine de procédures (106) mais ce nombre recule de près de 4%.
Les activités encore à la peine voire en fortes difficultés
Dans l’agriculture, les tensions se concentrent dans la culture de la vigne (50 ; +78%) et de l’élevage de vaches laitières (25 ; +150%).
Dans le commerce de détail, la situation reste compliquée ce trimestre pour le véhicule automobile (300 : +30%), le meuble (85 ; +60%), la pharmacie (30 ; +76%). Dans le commerce de gros, la plupart des activités sont dans le rouge, notamment la boisson (34 ; +79%) ou le mobilier domestique (16 ; +45%).
L’industrie manufacturière dérape sensiblement dans la récupération de déchets triés (17 sociétés ; +89%) mais aussi la fabrication de matériel médico-chirurgical et dentaire (29 ; +61%).
Les services informatiques se tendent dans le conseil en systèmes et logiciels informatiques (111 ; +59%)
Les transports routiers de fret interurbains (183 ; +39%) comme de fret de proximité (261 ; +43%) sont nettement dans le rouge.
Dans les services aux entreprises, le nombre de défaillances augmente encore rapidement dans le nettoyage courant des bâtiments (177 ; +34%) ou la sécurité privée (110 ; +45%)
Mais c’est la construction qui présente les tendances les plus lourdes et dans un plus grand nombre d’activités. Ainsi, la maçonnerie a-t-elle ravi à la restauration le fauteuil de leader des défauts du trimestre. 850 maçons sont tombés ce trimestre, c’est 38% de plus qu’au cours du 2e trimestre 2023. Dans le gros œuvre, la construction de maisons individuelles a enregistré 274 procédures (+ 54,8%). Le second œuvre n’est pas épargné. Les travaux d'installation électrique offrent la meilleure résistance (299 ; +10%), mais les autres activités subissent fortement la conjoncture. C’est le cas notamment des travaux de plâtrerie (215 ; +50%), de menuiserie bois et PVC (260 ; +60%) ou de travaux d'installation d'équipements de climatisation (163 ; +87%).
Les Travaux Publics sont alignés à la moyenne générale (210 ; +23,5%).
Les agences immobilières (290) enregistrent toujours des tendances lourdes (+58%).
Thierry Million, directeur des études Altares, conclut : « Ce trimestre a été un des plus lourds qu’a connu notre économie. Cependant, les signaux positifs observés au cours du premier trimestre sur le B2C s’amplifient ce printemps. Ainsi est-il possible d’envisager un ralentissement plus franc des défaillances dans les mois à venir. Néanmoins, la faiblesse de la conjoncture handicape les sociétés fragilisées par une dette Covid non entièrement réglée. Si les PME et ETI présentent globalement une vulnérabilité moindre que lors des mois précédents, les PME restent en fragilité. Car certaines PME de taille « moyenne » présentent des structures financières insuffisantes pour pouvoir rivaliser sur les appels d’offres ou financer leurs développements. Dans une économie en panne, il est difficile de tenir pour ces employeurs de nos territoires. L’hypothèse des 64 000 défauts pour 2024 partagée en début d’année reste à ce stade envisageable. »
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