Réforme des retraites : le rejet des patrons de TPE

Majoritairement opposés à la réforme des retraites, les patrons de TPE affichent une forte défiance envers le gouvernement.

Les patrons de TPE, dans leur grande majorité, éprouvent le même sentiment de rejet que l’ensemble des Français face à la réforme des retraites, selon le dernier baromètre Fiducial – IFOP. Près de deux tiers d’entre eux ne veulent pas entendre parler de 64 ans. Seuls 36 % appuient le gouvernement, ce qui est un peu plus que pour l’ensemble des Français (31 %) et beaucoup plus que les salariés (24 %). Plus la taille de la TPE s’accroit, plus l’adhésion au projet de loi augmente, et quand on tangente les PME (19 salariés), le soutien devient majoritaire.

Plusieurs analyses peuvent expliquer ce rejet. Le parcours des patrons, qui n’est pas linéaire et qui leur ont souvent fait cumuler plusieurs régimes de cotisation et créer du flou, les très petits montants de retraites des patrons tout autant que le critère de pénibilité, qui n’est jamais évoqué dans leur cas. Pourtant, les très longues semaines de travail, le stress permanent, le multi-tâches constituent autant de situations difficiles à supporter sur le long terme.

Soutien aux manifestations

Les patrons rejettent la réforme et soutiennent les manifestations à hauteur de 54 % (20 % seulement y sont opposés). C’est une relative surprise, surtout quand on se rapporte aux mouvements sociaux de 1995 et 2010, qui avaient vu une forte critique des dirigeants de TPE. Quant à la suite des évènements, 77 % anticipent un durcissement de l’opposition, qui pourrait avoir pour 65 % des répercussions négatives sur leur activité.

Pessimisme écrasant

Ces chiffres entrent en résonnance avec une très large défiance envers Emmanuel Macron et son Gouvernement. 66 % des dirigeants de TPE n’ont pas confiance (41 % n’ont pas du tout confiance) dans les mesures et actions économiques annoncées ou mises en place par l’exécutif. On note là aussi un clivage assez prononcé selon la taille de l’entreprise. Les « 10 à 19 salariés » sont expriment leur confiance à 56 %, et plus la taille diminue, plus le chiffre baisse.

Le même pourcentage de patrons (66 %) estime que le gouvernement ne prend pas en compte leurs préoccupations. Plus frappant, 45 % des patrons ayant voté Macron à la présidentielle partagent la même analyse. Quand les fidèles désertent, ce n’est jamais bon signe. Le vote des patrons est traditionnellement à droite, on a pu le constater avec force en 2007 et 2012 en faveur de Nicolas Sarkozy, tout autant que par le rejet massif des années Hollande (à des proportions plus importantes encore que celles enregistrées actuellement). Le vote Macron avait été majoritaire en 2017 et 2022 pour les patrons de TPE.

La résultante de cette défiance se retrouve dans l’appréciation du climat des affaires. C’est un pessimisme écrasant (76 %) qui se dégage. On parle là du climat global, les dirigeants s’avérant un peu plus sereins quant à leur propre activité (48 % d’optimisme).

Dépôts de bilan à craindre

C’est une statistique forte, qui doit être corrigée par une tendance : sur 71 baromètres, l’optimisme n’a été majoritaire qu’à 6 reprises. Et par un phénomène, des intentions d’embauche assez élevées, notamment dans les + 6 salariés, même si la complexité de recruter existe, puisque 41 % des entreprises ayant ouvert un poste ne l’ont toujours pas comblé en six mois.

Dans cette morosité ambiante, 44 % des TPE déclarent rencontrer des difficultés financières. 20 % d’entre elles craignent d’être contraintes de déposer le bilan et 5 % pensent que ce sera dans les six prochains mois. Cela touche tous les secteurs, toutes les tailles, mais surtout celles qui ont été placées en survie artificielle pendant le « quoi qu’il en coûte ». Le PGE représentait quelque 25 % de leur chiffre d’affaires, et elles sont désormais dans une situation quasi-impossible de remboursement.

Rappelons que le nombre de défaillance poursuit sa progression amorcée depuis 18 mois. La Banque de France a annoncé 45 120 défaillances sur un an (avril 2022 - mars 2023), contre 30 285 un an plus tôt. Ce mouvement touche tous les secteurs de l'économie et confirme que la barre des 60 000 sera probablement atteinte cette année. 

Vient s’ajouter l’inflation, qui frappe surtout l’énergie et les matières premières. Face à cette hausse des prix, 66 % des TPE ont répercuté les coûts sur les prix de vente, 80 % ont diminué les dépenses, 48 % ont reporté des investissements. Seules 10 % ont réduit les effectifs.

   

 

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