Les vrais chiffres de la crise

L’augmentation du nombre de radiations et de procédures collectives témoigne des souffrances des entreprises en 2022.

Création d’entreprises en baisse, radiations et procédures collectives en forte hausse. Le bilan national des entreprises élaboré par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce et l'institut Xerfi Spécific est sans appel.

Contrairement aux chiffres annoncés par l’Insee, qui effectuent leurs statistiques sur des bases plus larges que celles des greffes, ce sont 573 132 entreprises qui ont vu le jour l’an dernière, en baisse de 6,2 % par rapport à 2021. Un tiers de ces créations se sont effectuées sur le régime de l’auto-entrepreneuriat. Les activités immobilières sont restées le premier secteur d’activité en termes de nouvelles immatriculations (20,7% du total). Le podium était complété par le secteur du commerce (16,8%) et le conseil aux entreprises (15,5%). Ensemble, ils concentraient 52,4% des immatriculations totales en 2022. Par ailleurs, le secteur transport et entreposage retrouve un poids beaucoup plus proche de la « normale » après une année 2021 atypique. Paris concentrait 9,3% des immatriculations, largement devant Lyon (1,3%) et Toulouse (0,9%).

346 511 entreprises ont été radiées du registre des commerces et des sociétés (RCS) l’an dernier, en hausse de 11,6 %. Confrontés à des difficultés croissantes de paiement et de trésorerie, couplées à une conjoncture économique difficile, nombre de chefs d'entreprises ont préféré mettre définitivement fin à leur aventure entrepreneuriale. Les activités les plus représentées dans les radiations en 2022 relevaient du commerce (22,3%), de l’immobilier (18,2%) et du conseil / services aux entreprises (11,9%).

Les radiations volontaires ont été majoritaires comme principal motif de radiation en France, représentant 51% du total. Venaient ensuite la radiation à la suite d'une procédure collective (32,5%) et la radiation d'office (13%).

Radiations volontaires

37 468 procédures collectives ont été ouvertes, en hausse de 52 % en un an. Si les entreprises semblent aujourd'hui subir les effets à retardement de la crise sanitaire et de la dégradation du contexte économique international, le total des procédures collectives reste nettement inférieur aux niveaux observés en 2018 et 2019, où près de 45 000 ouvertures procédures collectives étaient alors ouvertes par an. L’effet de rattrapage va donc se poursuivre pendant au moins un ou deux ans. Le secteur du commerce paie le plus lourd tribut et se hisse en tête des radiations (22,3 % du total des radiations enregistrées sur l'année) comme des entreprises en difficulté (23,5 % des procédures collectives, en hausse de 56,1 % par rapport à 2021).

 

 

 

 

 

« Notre tissu entrepreneurial a malheureusement commencé à montrer de premiers signes de défaillances. Le bilan que nous pouvons aujourd'hui dresser de cette situation s'éclaircit toutefois sensiblement dès lors qu'on le compare aux dynamiques observées avant la crise sanitaire de 2020. Ce constat nous invite indubitablement à saluer l'exceptionnelle résistance des dirigeants d'entreprises français, pourtant confrontés à une accumulation de crises qui se succèdent et plongent notre économie dans une climat d'instabilité et d'incertitude de plus en plus profond », analyse Thomas Denfer, président du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce.

L’emploi pourrait être l’un des principaux problèmes de l’année à venir. « La situation économique ne justifie absolument pas les excellents taux d’emploi que nous constatons », commente Laurent Frelat, vice-président de Xerfi Spécific. « Les entreprises résistent dans l’espoir que demain sera meilleure, et aussi sous la contrainte des difficultés de recrutement. Elles conservent leurs effectifs au lieu de les rationnaliser. Mais cela ne pourra pas durer éternellement. Si l’inflation dure et s’amplifie, le dévissage sur l’emploi est un scénario écrit d’avance, avec des répercussions sur la consommation et l’activité économique. On constate déjà un certain nombre de licenciements dans de grandes sociétés emblématiques. Si la baisse de l’inflation qui se fait sentir aux Etats-Unis arrive à temps, les dégâts pourront être limités ».

Guichet unique : une situation préoccupante

Thomas Denfer a également évoqué la situation pour le moins tendue sur le nouveau guichet unique des entreprises et ses dysfonctionnements, empêchant de réaliser un certain nombre de formalités.

« Depuis le début de l’année, nous avons reçu 47 000 formalités sur l’ensemble de 141 greffes. C’est 30 % de moins qu’en 2022. Nous sommes clairement en sous-régime par rapport aux démarches obligatoires que doivent accomplir les entrepreneurs. Il manque 110 000 formalités, cela pose un sujet de sécurisation de l’activité économique française et de retard de mise à jour du RCS. On en mesurera les impacts dans quelques semaines. Le ministre de l’économie a assuré que la plateforme serait fonctionnelle à 100 % début mars, mais cette situation singulière et inédite ne cesse de nous interpeller et nous mobiliser ».

   

 

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